lundi 4 mai 2009

PENSER TARNAC ET LA RECESSION QUI VIENT…

Ce texte paru le 29 Avril 09 est écrit par le syndicat de policiers Sud Intérieur 
Solidaires Unitaires Démocratiques Intérieur

Mardi 11 novembre 2008, Opération Taïga sur le plateau de Millevaches : une Indicible Armada constituée de plus de cent policiers levalloisiens de la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI) et de la Sous Direction anti-terroriste de la PJ (SDAT), d’unités de gendarmerie ainsi que de renforts locaux investissait, appuyée par un impressionnant appareillage logistique (hélicoptère, moyens techniques, dizaines de journalistes bien matutinaux… ), la ferme Le Goutailloux à Tarnac.

C’est bientôt sur un mode aussi épique qu’ébaubi que les médias relateront à la France subjuguée une équipée ayant mené à l’interpellation de 20 personnes en Corrèze, Lorraine et Haute-Normandie et lui apprendront - sur la base d’informations provenant des milieux de l’enquête - que ce groupe anarcho-autonome (sic !) possiblement responsable des récents sabotages du réseau ferroviaire ne sévirait plus.

Cadrant, le jour même, le flux médiatique, Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, se félicitait du succès de la belle entreprise et soulignait, au mépris de la présomption d’innocence, la dangerosité d’une telle mouvance extrémiste (le lendemain à l’Assemblée Nationale, elle déclarait (…) ces individus se caractérisent par le rejet de toute expression démocratique et par l’appel à des mouvements violents...).

Dès le 12 novembre et sans autre forme d’investigation, le quotidien Libération chevauchait gaillardement ce palefroi et tonitruait : Sabotage du réseau TGV, l’ultra gauche déraille… D’autres canards tout aussi risibles narreront la geste d’« anarchistes » si paradoxaux et tant subversifs qu’au rebours de leur idéologie, des épiciers libertaires se seront - ô suprême pied de nez ! - choisi un leader (et pourquoi pas un duce, un conducator, un gourou babouviste ou un dieu bloomsburien ?).

Au terme des 96 heures de garde à vue, le juge Fragnoli mettait en examen neuf des interpellés et maintenait en réclusion cinq d’entre eux. Conférençant ensuite devant la presse, le procureur Marin précisait: Il y a une sorte de noyau dur composé de 5 personnes (…) qui va se voir reprocher, pour l’un d’entre eux (sic) d’être le dirigeant d’une structure à vocation terroriste. (…) Cette structure (bis) appelée la Cellule Invisible avait pour objet la Lutte Armée (…). Il n’est pas exclu que ce groupe ait envisagé des actions plus violentes et notamment contre des personnes.

Ce réquisitoire qu’aurait tant apprécié Flaubert, démontrait qu’à défaut d’éléments probants indéniablement tangibles, l’accusation devait recourir à l’opus post situationniste L’insurrection qui vient – classique texte de déconstruction politique, mi poétique – mi prospectif, signé d’un Comité invisible mais attribué à Julien Coupat (le supposé leader) –, très légalement déposé par l’éditeur, pour habiller l’affaire.

Alors que plus de 5 mois après les faits, seul Julien Coupat demeure, malgré l’avis premier du Juge des Libertés et de la Détention, incarcéré, le Comité de soutien, un panel varié d’organisations politiques, associatives et syndicales, ainsi que des parlementaires (Verts, PCF, PS …) persistent à s’étonner de l’exceptionnalité, du caractère hétérodoxe voire potentiellement liberticide de cette architecture.

De fait, selon la Défense, il n’apparaît nullement, qu’une procédure initiée en préliminaire dès avril 2008 et ayant donné lieu à des dizaines d’heures d’écoutes téléphoniques, de filatures et d’investigations diverses ait aucunement corroboré le schéma prescrit ; à savoir : l’existence à Tarnac d’un noyau nihiliste et violent en relation tant dans l’Hexagone qu’à l’Etranger avec des groupes à vocation terroriste.

Se caparaçonnant irrémédiablement tel Gregor Samsa muté en insecte, l'expressionnisme ambigu de la Chose prit une teneur nouvelle à l’audition par la SDAT d’Eric Hazan, gérant de la Fabrique, éditeur de L’insurrection qui vient. Cette mesure semblait emblématique d’un fourre-tout bordélique où l’incrimination retenue «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste» est prioritairement étayée par les idées, les écrits présumés et/ou l’activité militante légale des concernés.

Au-delà de la remise en liberté immédiate de Julien Coupat, Sud Intérieur exige l’abrogation des lois sécuritaires votées depuis 15 ans, la suppression des juridictions d’exception et la fin de la criminalisation du mouvement social.

Mais qui poursuivra les responsables avérés de la Récession qui vient ?

Visiblement ni l’Exécutif, ni le Parlement, ni la Justice !

Ses accoucheurs néo-libéraux auront pourtant généré infiniment plus de destructions que tous les Comités invisibles…

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