samedi 10 octobre 2009

"Aude a la lumière"





Aude Lancelin qui travaille pour le "Nouvel-Observateur" ;) rappelait, dans un astucieux lien hyper texte incorporé à sa chasse au "spectre" du jour, qu'elle avait récemment, succombé à la mode du "trouver le secret" à propos du dernier texte attribué au «Comité invisible» (reposté aussi sur ce blog dans la même rubrique le 5/06/09) intitulé "Ingénierie sociale et mondialisation", secret levé non sans l'aide précieuse d'Eric Hazan dans :

"Un Coupat peut en cacher un autre" paru le 22/09/09

C'est un texte qui agite le web depuis le début de l'été. Il est signé du «Comité invisible», le mystérieux collectif auteur de «l'Insurrection qui vient», et se dissémine de blogs mal-pensants en sites subversifs, y suscitant enthousiasme débridé ou agacement hystérique.

Dédié « fraternellement » à Alain Bauer, le fameux conseiller ès criminologie et lutte anti-terroriste de l'Elysée à l'origine de l'arrestation de Julien Coupat et de ses camarades de Tarnac, il est sobrement intitulé «Ingénierie sociale et mondialisation». En exergue de ce libelle d'une quarantaine de pages paranoïaques et brillantes, on peut lire l'article 35 de la «Déclaration des droits de l'homme et du citoyen» de 1793, couramment attribuée à Hérault de Seychelles :

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».

Que Michèle Alliot-Marie se rendorme toutefois, que le parquet anti-terroriste rengaine ses cagoules, que les aficionados patientent encore, il ne s'agit semble-t-il pas d'un nouveau samizdat du véritable «Comité invisible». C'est en tout cas ce que nous assure Eric Hazan, patron des éditions la Fabrique, qui a publié «l'Insurrection qui vient» en 2007. «Toutes sortes détails montrent qu'il s'agit d'un faux. Rien que le titre, déjà...Mais le vrai « Comité » est au courant bien sûr. Ils l'ont lu et trouve la démarche très amusante.» Une contrefaçon, donc ? L'œuvre de groupies douées, se rêvant dans la peau des ennemis publics du gouvernement Sarkozy ? Il est vrai que la référence élogieuse à la perspicacité du graphomane multicartes Jacques Attali, dès la troisième page, laisse d'emblée peu de chances à l'ovni d'avoir été élaboré par le supposé think tank corrézien de Julien Coupat (1).

Beaucoup d'éléments font pourtant de ce texte dense et intellectuellement fouillé un leurre assez convaincant. Analyse de la fabrique du consentement et des différentes stratégies de hacking social par lesquelles on cherche aujourd'hui à faire admettre au peuple français une destruction méthodique des services publics et un alignement complet sur la mondialisation libérale, le texte se termine s'achève sur un appel enflammé à la défense du programme du «Conseil National de la Résistance» de 1945. Outre cette inspiration gaullo-communiste, on y trouve des références à «la Stratégie du choc» de Naomi Klein ou à Jean Baudrillard, ainsi que des allusions à la «Théorie de la Jeune fille» élaborée par «Tiqqun», la revue autrefois animée par Julien Coupat. Un collectif du début des années 2000 dont Eric Hazan s'apprête à publier un nouveau recueil le 25 septembre (2), et que beaucoup voient comme la matrice historique du «Comité invisible».

Le suspens demeure donc entier. Il y aurait ainsi un individu ou un groupe anonyme suffisamment dérangé pour emprunter la non-identité d'un collectif lui-même anonyme, et la police française laisserait faire ? Il y aurait un répliquant du désormais célèbre «Comité» qui n'aurait pas encore été démantelé, et dont le perfide leader n'aurait pas encore été expédié préventivement à la prison de la Santé? La Toile et le pays entier attendent anxieusement les explications forcément rassurantes que saura leur fournir à ce sujet le nouveau ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux. Un Coupat il en faut toujours un, c'est quand il y en beaucoup qu'il y a des problèmes.


Aude LANCELIN.



(1) A signaler que Julien Coupat a toujours nié être l'auteur de «L'Insurrection qui vient», texte dont le juge d'instruction en charge de l'affaire des sabotages de caténaires SNCF cherche à lui faire endosser l'entière paternité.

(2) « Tout a failli, vive le communisme !», par Tiqqun, éditions la Fabrique, en librairie le 25 septembre.





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